Voici l’article imprimé dans le Pyrénées Magazine de sept/oct 2017. Il y a des imprécisions plus ou moins sans importance, mais quelques rectifications me semblent nécessaires dans un texte qui va être lu pendant 2 mois…
Après avoir traversé trois fois les Pyrénées d’est en ouest, d’ouest en est, et par les 212 trois mille, l’alpiniste bigourdan Romain Da Fonseca a décidé de réaliser la première traversée de la chaîne en chiens de traineaux d’Hendaye à Banyuls-sur-Mer.
“Quand je fais quelque chose, je vais jusqu’au bout”, aime répéter Romain Da Fonseca. Jusqu’au bout de ses rêves, c’est sûr, pour ce grand brun athlétique de 28 ans qui vit à Bun, dans Val d’Azun, au cœur des Hautes-Pyrénées. Accompagnateur en montagne, moniteur de voile, depuis près de dix ans, il fait ses gammes sur toute la chaîne. A 19 ans, il réalise sa première traversée des Pyrénées en autonomie (-> « autonomie » est à relativiser, j’ai toujours eu de bons ravitailleurs, il y en avait seulement peu cette fois là). “Je venais de passer mon bac. Je voulais me couper de quelque chose, prendre du recul par rapport aux études. Ça a été dur de porter tout le temps la tente, de prendre quatre jours de pluie d’affilée ou de souffrir de la faim par manque de ravitaillement”. Parti avec son copain Eric, il finit tout seul, en 35 jours. Passage initiatique. “Je venais de passer du rêve à la réalité”. 2012 sonne la revanche. Romain est en canne. “J’avais du matériel hyper léger. On a alterné nuits à la belle étoile, en cabane et en refuge”. Les souvenirs sont forts : “Au col du Cylindre, on a mis les casques car de gros cailloux volaient à cause du vent violent. Aux Sarradets, on n’y voyait pas à 3 mètres. Il fallait que je monte au Taillon. J’ai continué toute la crête dans le brouillard. Quand je suis arrivé au sommet, ça s’est dégagé. J’avais la mer de nuages à mes pieds. Quel spectacle ! J’étais là au bon moment. Quand je suis revenu au refuge, personne ne me croyait”.
Romain traverse la chaîne en 24 étapes, en faisant photos et vidéos. “Je voulais foncer, dévorer la montagne. De l’Aneto au Balaïtous, en huit jours on réussit à conquérir trente sommets”. De là est née l’idée de tutoyer les 212 sommets pyrénéens de plus de 3000 m en trois mois. C’était en 2014. “J’ai mis deux ans à tout préparer pour trouver sponsors et compagnons de cordées, comme David Marfaing, Pierre Drouilhet, Yannick Roques. Romain veut rendre hommage à l’alpiniste Patrick Berhault, mort en 2004, alors qu’il gagnait les 82 sommets alpins de plus de 4000. “Je savais tellement de choses sur lui que j’avais l’impression de l’avoir toujours connu. Du coup, j’ai rencontré toute sa famille au hameau du Lac, moment fort et je l’ai impliqué dans le projet. Et quand on a réalisé l’hommage à Gavarnie, sa femme (-> son « ex-compagne » comme elle aime le rectifier) et ses filles sont venues. Et c’est Didier Angelloz, son grand copain, qui est venu m’aider pour enchaîner 50 sommets en neuf jours. “Pour enfin terminer le secteur de Posets-Aneto. Didier, c’est le compagnon qui t’aide vraiment. Quand on est arrivés au pic Margalide, on faisait les relais en tremblant tellement il faisait froid (-> l’arête des Salenques, c’était bien avant avec Pierre Drouilhet qui doit en avoir un sacré souvenir (!), et non Didier Angelloz). Cette traversée, c’est un autre monde ! Pendant trois mois, on a vécu dans le froid et la neige d’un été pourri, dans le minéral de cette altitude. Ce fut un mois et demi de grimpe et un mois et demi d’attente pour mauvais temps. Dès qu’il y avait une fenêtre, il fallait sortir. Bonheur quand même de s’amuser à relier les 16 sommets du Vignemale. “Je veux écrire un livre sur cette traversée épique” (-> je n’ai bien évidemment jamais employé le mot « épique », d’autant plus que ce projet est loin d’être dans mes favoris – le livre est une demande des gens qui revient fréquemment). Mais avant Romain est passé à un nouveau défi : traverser les Pyrénées en traineau à chiens. “Je rêvais d’avoir un élevage de chiens de traineau. Je suis allé me former auprès de Frédéric Desbree à Gaillagos, un musher qui possède 30 chiens. “Je veux que tu me mettes dans le dur tout de suite !” lui demande-t-il. Romain achète huit chiens et monte sa meute. “J’ai un chenil à la maison. Enfin, c’est la maison qui est devenue un chenil. Je suis sur les traces de Paul-Emile Victor qui est le seul à avoir fait Nice-Chamonix l’hiver 1938 en traîneau (-> plutôt « réalisé un défi similaire », car je crois qu’une autre personne a effectué Nice-Chamonix – de plus, il s’agit d’une expérience alpine très différente). J’ai une équipe performante et une logistique tout le long”. Romain partira de Hendaye et devrait rallier Banyuls-sur-Mer entre février et mars 2018. Paul Bonhomme et Didier Angelloz l’aideront à franchir les passages à près de 3000. Stéphane Dugast (-> c’est tout frais, mais Stéphane n’est à priori plus de l’aventure) et Bertrand Delapierre le suivront pour réaliser un film documentaire sur “la Transpyrénéenne”. Romain Da Fonseca est confiant : “Je me lève tous les jours à 3 h du matin et je fais jusqu’à 80 km avec les chiens (-> souvent très tôt oui, mais heureusement que je ne me lève pas tous les jours à 3h !). Il faut avoir la caisse et un bon rythme de vie pour réussir”. L’aventure continue !
Patrice Teisseire-Dufour
Je tiens à préciser aussi que sur la photo retenue par la rédaction je ne suis pas en train d’étrangler mon chien Little, seulement de le retenir pour ne pas qu’il mange le labrit qui le nargue…
Romain